Document de principes
Affichage : le 27 janvier 2021
Alyson Shaw MD; Société canadienne de pédiatrie, Groupe de travail de la petite enfance
Le présent document de principes aidera les dispensateurs de soins à évaluer l’alphabétisation précoce dans les familles et à leur donner des conseils, et ce, dans presque tous les contextes d’exercice. On y définit les habiletés d’alphabétisation émergente, y compris l’apprentissage précoce du langage et des récits oraux, et on y explore les bienfaits de la lecture, de la parole et de la chanson auprès des nourrissons et des tout-petits, tant pour eux que pour les adultes qui en sont responsables. La lecture partagée au coucher et d’autres habitudes liées au langage ont un effet positif sur la santé familiale, relationnelle et socioaffective. L’exposition précoce à la langue parlée à la maison peut contribuer à l’alphabétisation dans les autres langues auxquelles l’enfant pourrait être exposé. On y trouve enfin des recommandations particulières pour les cliniciens qui conseillent les familles en matière d’alphabétisation précoce.
Mots-clés : alphabétisation; chanson; langage; lecture partagée; musique; récit oral
Le nourrisson se développe dans un environnement relationnel, et la relation avec ses parents demeure la principale influence de son fonctionnement affectif et comportemental [1][2]. Les interactions « service-retour », comme répondre par un sourire et encourager les mots en réponse au babillage, sont fondamentales aux relations précoces [3] avec le nourrisson et se produisent lorsqu’on porte une attention étroite à ses signaux et qu’on lui parle, qu’on lui chante des chansons et qu’on lui fait la lecture dès la naissance. Ces mêmes interactions favorisent l’émergence de l’alphabétisation, qui repose sur le langage, est acquise en société et touche les domaines cognitifs et socioaffectifs de l’apprentissage, essentiels au développement d’un enfant en bonne santé.
Encadré 1. Qu’est-ce que l’alphabétisation précoce? |
L’alphabétisation précoce (ou émergente) se développe chez les jeunes enfants lorsque des adultes (quelles que soient leur langue ou leurs aptitudes) leur font la lecture, leur parlent et leur chantent des chansons. La relation entre le langage et l’alphabétisation est interactive et synergique; elle n’a pas forcément besoin de livres. La langue des signes, la musique et les récits oraux (histoires) [4] font partie des nombreuses trajectoires vers l’alphabétisation, notamment lorsqu’elles sont vécues dans un contexte social, liées à la culture et partagées avec la famille et la communauté. Dans bien des communautés issues des Premières Nations, des Inuits et des Métis, la langue est inextricablement liée à la culture, et ces deux éléments sont des déterminants de la santé [5]. |
L’alphabétisation a une plus grande corrélation avec la trajectoire de vie que la profession ou le revenu [6]-[8], ce qui en fait un volet pratique des conseils préventifs. La promotion de l’alphabétisation dans les milieux de la santé ne vise pas seulement à favoriser la réussite scolaire ou la maîtrise d’une langue. En effet, ses bienfaits dans les milieux de la santé, par des programmes comme Reach Out and Read (États-Unis), sont fermement démontrés dans les publications [9], qui révèlent ce qui suit :
Une exposition insuffisante au langage auprès d’un adulte bienveillant pendant la petite enfance a des coûts humains et économiques substantiels. Un faible taux d’alphabétisation est lié à des maladies chroniques, à une mauvaise santé physique et mentale et à une utilisation élevée des services de santé aigus [8]. D’après une évaluation récente, une augmentation de 1 % du taux d’alphabétisation à l’âge adulte pourrait stimuler le produit intérieur brut du Canada d’environ 67 milliards de dollars [16].
Le présent document de principes porte sur les bienfaits de la lecture, de la parole et de la chanson pour les nourrissons et les tout-petits, notamment en matière de santé familiale, relationnelle et socioaffective. Lorsque le terme « parent » est utilisé (au singulier ou au pluriel) dans le présent document, il désigne toute personne ayant la responsabilité principale de l’enfant, quel que soit le modèle familial. Le terme « famille » désigne le foyer de l’enfant. Dans la plupart des recherches sur l’alphabétisation, la mère est considérée comme la première influence, la plus constante, sur le langage et l’alphabétisation précoce de l’enfant, mais de plus en plus de publications révèlent que des pères présents peuvent avoir un effet positif sur la réussite scolaire et le bien-être socioaffectif de l’enfant, quel que soit le revenu, l’ethnie ou la scolarité de la famille [17]-[21].
L’alphabétisation précoce (ou émergente; voir l'encadré 1) désigne les habiletés, les interprétations et les attitudes qu’adoptent les jeunes enfants avant d’être en mesure de contrôler les formes de lecture et d’écriture classiques [22]. Jusqu’à l’âge de trois ans, les enfants élevés dans des milieux qui valorisent la culture et le langage acquièrent des habiletés préalables à l’alphabétisation qui les préparent à l’apprentissage de la lecture et de l’écriture et à la réussite scolaire. Ces composantes s’assimilent mieux par l’expérience directe, dans le cadre d’interactions personnelles avec les parents et les autres personnes responsables, dans des milieux bienveillants et participatifs qui valorisent le langage, en commençant par chez soi [14][23][24].
Certaines habiletés d’alphabétisation émergente, comme connaître l’alphabet ou écrire son nom, sont prédictives de l’alphabétisation plus tard, même après avoir tenu compte du quotient intellectuel ou de la situation socioéconomique. Ces habiletés ont toujours été enseignées aux très jeunes enfants [22]. Par ailleurs, la pratique des récits oraux racontés à la maison est de plus en plus reconnue comme un solide prédicteur d’alphabétisation, notamment dans les cultures de tradition orale [25][26]. Les enfants de moins de quatre ans qui entendent et racontent des histoires à la maison sont les plus susceptibles de démontrer de la facilité et de l’intérêt à lire à leur arrivée à l’école [27][28].
On constate un lien direct entre la lecture à voix haute aux jeunes enfants et la maturité scolaire [12][13]. Tant les recherches sur le cerveau [23] que sur des programmes comme Reach Out and Read [10][11] préconisent de plus en plus la lecture à voix haute dès la naissance [15][29] pour favoriser l’attachement et l’alphabétisation émergente. L’alphabétisation dépend des habiletés de l’enfant sur le plan de la parole et de l’écoute et touche un large éventail d’interprétations et de compétences précurseures de la lecture et de l’écriture [30].
Le langage joue un rôle crucial dans l’acquisition de l’alphabétisation, et le nourrisson le découvre longtemps avant de commencer à parler. Les interactions personnelles et sociales sont essentielles à ce processus. Les interactions directes, sous forme de communications dirigées vers le nourrisson, c’est-à-dire l’utilisation d’un ton plus aigu, d’une courbe exagérée du timbre de la voix et d’un son chantant [31], attirent davantage son attention et renforcent le lien entre les mots et ce qu’ils représentent dans la réalité [32][33].
À l’âge de quatre mois, le nourrisson peut distinguer sa langue maternelle de langues aux rythmes semblables [34]. À l’âge de six mois, il relie les noms concrets qu’il entend avec les objets qui l’entourent ou qu’il utilise dans son environnement familial [32].
L’environnement langagier du nourrisson entre l’âge de six et 12 mois est capital pour l’acquisition de la forme et de la structure (syntaxe) complexes de la langue (p. ex., les mots-questions, les démonstratifs, les particules) [34]. Entre l’âge de 11 et 12 mois, s’il y est assez exposé [34], le nourrisson comprend bien les mots courants et les sons issus des langues parlées à la maison depuis sa naissance [31][32].
Entre l’âge de 12 et 20 mois, le nourrisson acquiert une meilleure compréhension du sens du langage [32]. Le langage réceptif (la compréhension) précède généralement le langage expressif (la parole). Enfin, après avoir étudié les sons et les mots qu’il entend depuis près de deux ans, il produit généralement ses premières combinaisons de deux mots. En effet, vers l’âge de deux ans, son utilisation du langage augmente de manière spectaculaire [23].
Dans les heures suivant sa naissance, le nouveau-né peut distinguer la langue de sa mère, entendue dans l’utérus, d’une langue au rythme inhabituel [31][34][35]. À la naissance, le nourrisson est en mesure de distinguer de nombreuses unités phonétiques (les sons), sinon toutes, de toutes les langues du monde, mais à l’âge de quatre mois, il ne prête attention qu’aux sons des langues auxquelles il est exposé [34][36].
Entre l’âge de six et 12 mois, le cerveau subit des changements physiques qui renforcent les connexions neuronales permettant de reconnaître les langues entendues régulièrement et qui élaguent celles peu utilisées. Cette mobilisation neuronale sélective pour une ou plusieurs langues est importante, car elle jette les bases de plusieurs étapes subséquentes d’acquisition du langage, comme l’apprentissage des mots et la grammaire. Les nourrissons exposés à au moins deux langues dès la naissance deviennent des spécialistes de toutes les langues qu’ils entendent [30][31], ce qui favorise l’apprentissage de plusieurs langues et constitue une compétence sociale notable dès la période préscolaire [6][37][38]. Les enfants qui apprennent plus d’une langue à la fois passent par les mêmes étapes du développement langagier que ceux qui n’en apprennent qu’une.
Les enfants exposés à plus d’une langue peuvent diviser leur temps et leur attention de manière inégale entre elles et entendre moins de mots et de phrases dans chacune d’elles que leurs camarades unilingues. Toutefois, si on combine toutes les langues, l’ampleur de leur vocabulaire atteint ou dépasse généralement celle des enfants unilingues. Les enfants bilingues, par exemple, ont tendance à rattraper les normes unilingues au primaire, surtout s’ils profitent d’un soutien dans les deux langues à la maison et à l’école [31]. Des bases solides dans une première langue créent des conditions optimales pour l’acquisition d’une seconde, car les habiletés langagières d’origine cérébrale sont transférables [34][38].
Il est primordial pour le nourrisson de faire l’expérience quotidienne de la parole, car plus il entend de « mots-étiquettes » pour désigner ce qu’il regarde et ce qu’il fait, plus sa compréhension globale s’en voit renforcée [32]. Jusqu’à récemment, on croyait essentiel que le nourrisson entende le plus grand nombre de mots possible pour enrichir son vocabulaire expressif [15][23]. Selon un nombre de recherches croissant, le principal mécanisme d’apprentissage de la langue est plutôt le tour de parole dans les conversations, particulièrement entre l’âge de 18 et 24 mois [23]. Les interactions bidirectionnelles répétitives (service-retour) sont mieux corrélées avec un vaste éventail d’habiletés langagières et cognitives plus tard au cours de la vie que la quantité de mots [23].
Les récits personnels, c’est-à-dire les conversations avec de très jeunes enfants sur des expériences communes, sont de puissants leviers pour l’alphabétisation émergente. La plupart des enfants âgés de 24 à 30 mois connaissent déjà les rudiments de ces récits. À divers degrés, ils peuvent séquencer les événements, établir une action dans le temps et l’espace et organiser une histoire au sujet d’un personnage central (souvent eux-mêmes) [28]. Les très jeunes enfants apprennent et explorent d’abord la forme narrative en parlant du passé avec leurs parents. Dans bien des cultures, les parents reviennent fréquemment avec leur nourrisson sur des événements communs passés et futurs et les explorent en profondeur. Sur le plan du développement, le jeune enfant commence à utiliser la structure narrative dans ses jeux avant même de pouvoir le faire avec des mots [28].
Le tout-petit découvre les récits lorsqu’un parent ou un autre adulte bienveillant lui décrit une expérience commune [26][28]. Il observe le visage du narrateur, collabore en hochant la tête ou en répétant un mot pour démontrer son intérêt ou encourager le narrateur à poursuivre, et réagit avec émotion [28]. Pour des raisons cognitives et affectives, les enfants veulent se faire répéter la même histoire encore et encore, car la répétition leur permet de l’internaliser et d’en maîtriser les éléments. En racontant des expériences ensemble, les familles construisent une structure narrative commune, renforcent les liens familiaux et enseignent ce qui constitue un bon récit [28][37].
Les récits représentent également un passeport vers la culture de l’enfant ou vers d’autres cultures [26][28][30]. Ils font appel à tous les éléments sociaux du langage : ils sont racontés en direct et avec expression (souvent avec des intonations vocales, des gestes, des expressions faciales et des mouvements corporels), et le jeune auditeur comprend souvent mieux un récit s’il lui est raconté que s’il lui est lu [4][25].
On n’a pas encore établi si le partage de la lecture dès la naissance apporte des bienfaits directs sur le développement [13], mais la lecture à voix haute ensemble, dès un très jeune âge et à une grande fréquence, semble stimuler le développement cognitif davantage que les autres activités familiales. Le partage de la lecture est ciblé et immersif; il favorise des interactions variées et fréquentes et procure une exposition au langage qui est un indicateur positif du développement langagier [6][13].
La lecture fréquente de la mère au jeune enfant à la maison renforce l’acquisition du vocabulaire et de la compréhension orale, même si la langue diffère de celle apprise à l’école [39][40], sans compter que la mère a tendance à parler davantage à son enfant lorsqu’elle lui fait la lecture que dans les autres contextes familiaux [14]. À tout âge, les livres partagés avec l’enfant contribuent à insuffler l’amour de la lecture [41].
En conversant avec leur nourrisson ou leur tout-petit à qui ils lisent un livre [6][14], les parents peuvent enrichir l’apprentissage en ajoutant des stratégies d’acquisition du langage comme le service-retour, la lecture dialogique (poser des questions pour encourager l’enfant à participer à la lecture) et le discours s’adressant aux enfants (p. ex., exagérer les différences phonétiques pertinentes). D’après les recherches, des échanges de qualité entre le parent et l’enfant qui partagent une lecture encouragent l’émergence d’habiletés cognitives qui facilitent l’apprentissage autonome et les échanges interpersonnels fructueux au moment d’arriver à l’école [6][42].
Le partage régulier et chaleureux de livres dès le début de la vie comporte des bienfaits relationnels importants à la fois pour le nourrisson et ses parents [14]. Chez le nourrisson, l’affect et la lecture partagée sont liés à un attachement sécurisant avec la mère [15][41]. Le partage fréquent et chaleureux de livres semble promouvoir un attachement sécurisant, maintenir l’attention du nourrisson et stimuler ses comportements prosociaux [17]. Chez les parents, les recherches relient la lecture partagée à un meilleur style parental [17], à une diminution de la dépression maternelle et du taux de stress [14][42][43], à un accroissement du sentiment de compétence et d’estime de soi [42][43] et à une augmentation de la réactivité. Les recherches révèlent également que ces facteurs relationnels sont amplifiés par les comportements associés à la lecture partagée, comme « se blottir l’un contre l’autre » (voir l’encadré 2) [6][41][42].
Selon de solides données probantes, la lecture partagée tôt dans la vie renforce des habitudes familiales positives, la lecture au coucher [12] représentant une première étape naturelle [13]. Idéalement, la lecture au coucher devrait commencer dès la naissance en raison de ses effets positifs sur le sommeil de l’enfant et sur la relation avec sa mère [13]. Dans un récent sondage réalisé aux États-Unis, la lecture au coucher était fortement associée à la lecture comme activité familiale favorite et à la lecture à voix haute au moins cinq fois par semaine [13][14]. Faire la lecture au nourrisson dès la naissance représente aussi une occasion d’attachement pour la fratrie, les parents qui n’allaitent pas et les pères [13]. De multiples études associent le partage de livres précoce, régulier et chaleureux avec la réactivité maternelle, la maturité scolaire et l’évolution cognitive positive [6].
Encadré 2. Les comportements des parents favorables aux bienfaits relationnels de la lecture, de la parole et de la chanson
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Puisque même les plus jeunes sont exposés aux technologies numériques au quotidien, les parents peuvent se demander en quoi se compare le partage des livres numériques à celui des livres imprimés [41]. Des études récentes portent à croire que l’apprentissage précoce est semblable dans les deux médias [49][50], mais de solides données probantes démontrent encore que, même lorsque les parents sont investis et l’enfant attentif, le partage de livres imprimés enseigne l’alphabétisation précoce et les habiletés langagières et favorise l’attachement mieux que celui des livres numériques [24][41][51][52] :
Plus la technologie est simple, plus son effet est bénéfique pour le développement précoce du cerveau.
Selon une récente étude de cohorte américaine, même si de nombreuses familles ne considèrent pas la lecture partagée comme une activité « favorite » pendant la période néonatale, elles aiment chanter des chansons à leur nouveau-né [13]. Le fait de chanter et de parler au nourrisson semble accroître son attention grâce à la courbe exagérée du timbre de la voix, à la structure musicale et linguistique cohérente et au ton de la voix [54]. Les chansons contiennent beaucoup de rimes, et pour le nourrisson, les rimes et les rythmes peuvent résonner davantage que le discours. Les berceuses et les chansons pour enfants sont souvent utilisées pour réconforter ou pour jouer, et leur structure et leurs sons simples et répétitifs peuvent promouvoir le développement précoce du langage [54]. Cependant, cette forme puissante de communication diminue habituellement très vite après l’âge de deux ans [45].
Un lien précoce et important entre le timbre et la conscience phonologique (la capacité de reconnaître les sons et de les utiliser) fait ressortir le lien étroit entre l’apprentissage de la musique et de l’alphabétisation [45][55]. Selon une étude, les exercices rythmiques et l’intégration des rythmes et des paroles des chansons aux jeux de l’enfant contribuent à préparer le cerveau à l’apprentissage de la lecture et de l’écriture [56].
Les chansons, les jeux de doigts (« L’araignée monte, monte ») et les jeux de mains sont des exercices d’alphabétisation qui peuvent être intégrés aux jeux, à l’heure de l’histoire et aux interactions avec le jeune enfant, de manière à soutenir la diversité, la créativité et la confiance en soi [47][57]. Il est démontré que les livres d’images inspirés de chansons pour accompagner et prolonger les activités de chant et de lecture motivent et détendent à la fois les parents et leur enfant, qui participe ainsi avec sa fratrie à un apprentissage synergique, et ils favorisent le développement du langage parlé et du vocabulaire, de la conscience phonémique et de la mémoire phonologique pendant la période préscolaire [45][46].
Les activités musicales collectives (comme l’heure du conte à la bibliothèque ou la chanson dans un milieu de garde) encouragent l’écoute attentive et la mise en mémoire, toutes deux précurseures de l’acquisition des habiletés de lecture [46][47]. Les chansons pour enfants peuvent enseigner des codes fondamentaux du langage et de l’orthographe, des rimes, des structures de phrases, des parties du discours et des nouveaux mots de vocabulaire et donner une idée de la narration et du séquençage [47]. La combinaison de la chanson et des mouvements contribue à l’enseignement des habiletés préparatoires à la lecture, comme le son des lettres et la reconnaissance du phonème médian (le son au milieu d’un mot), de même que la lecture précoce des mots aux enfants de maternelle [30][58]. De plus, ces habiletés sont acquises dans des contextes significatifs, actifs et expressifs [48]. La musique peut introduire l’enfant à une nouvelle langue, car il peut se sentir plus à l’aise de chanter avec d’autres que de s’exprimer par la parole [48]. Des mélodies familières peuvent aider le jeune enfant (ou ses parents) à deviner le bon mot plutôt qu’à trébucher en le lisant, à « suivre le courant » ou à chanter des nouveaux mots de vocabulaire, et ces expériences peuvent renforcer sa confiance en soi, sa mémoire phonologique et sa fluidité verbale [45].
Les dispensateurs de soins peuvent promouvoir et soutenir l’alphabétisation précoce de chaque enfant auprès de chaque famille qu’ils rencontrent dans leur pratique. Une approche de l’alphabétisation axée sur la famille exige de travailler avec les parents, de s’appuyer sur les forces de la famille et de l’orienter vers des ressources communautaires comme les bibliothèques publiques [37].
Le programme Reach Out and Read des États-Unis encourage les cliniciens à adopter les démarches suivantes :
Les cliniciens peuvent soutenir la culture de leurs patients et des familles en prenant conscience de leurs propres croyances et préjugés, en demeurant sensibles aux diverses cultures et en accueillant la diversité dans le milieu de la santé (voir l'encadré 3) [37][59].
Encadré 3. Mobiliser la culture et la communauté pour soutenir l’alphabétisation [37]
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Les dispensateurs de soins peuvent parler aux parents des bienfaits de la lecture, de la parole et de la chanson dès la naissance et dans pratiquement tous les contextes (p. ex., lors des visites prénatales ou des bilans réguliers, pendant une hospitalisation ou dans une clinique de continuité). L’intervention peut être brève tout en demeurant significative et devenir plus complexe à mesure que la relation avec la famille s’approfondit.
En transmettant aux familles de l’information sur le développement du cerveau et les interactions service-retour, les cliniciens peuvent insister sur les effets positifs et durables des actions parentales quotidiennes sur les enfants et les familles :
1. Intégrer la promotion de l’alphabétisation à la pratique au quotidien.
2. Aider les familles à acquérir des habitudes de promotion de l’alphabétisation.
Le comité de la pédiatrie communautaire, le comité de la santé des Premières Nations, des Inuits et des Métis et la section de la pédiatrie sociale de la Société canadienne de pédiatrie ont révisé le présent document de principes. Les auteurs tiennent à remercier tout particulièrement Roxana M. Barbu, Ph. D., qui a révisé les publications, et Jennie Strickland, qui a rédigé le document. Ils remercient également la Fondation pour l’alphabétisation des enfants canadiens qui a contribué à l’analyse bibliographique.
Membres : Sanjeev Bhatla MD (Le Collège des médecins de famille du Canada); Jean Clinton MD; Andrea Feller MD; Emmett Francœur MD; Kassia Johnson MD; Katherine Matheson MD (Académie canadienne de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent); Annie Murphy Savoie MD; Alyson Shaw MD; Robin Williams MD (présidente)
Auteure principale : Alyson Shaw MD
Avertissement : Les recommandations du présent document de principes ne constituent pas une démarche ou un mode de traitement exclusif. Des variations tenant compte de la situation du patient peuvent se révéler pertinentes. Les adresses Internet sont à jour au moment de la publication.
Mise à jour : le 8 février 2024